Les Samadhi du Samedi | Ep.63

Les Samadhi du Samedi | Ep.63

Les Samadhi du Samedi – LE NOUVEAU CONTRAT SOCIAL

L’évolution humaine s’est lentement produite au fur et à mesure de la découverte de nouveaux outils qui ont changé notre rapport avec la nature. Mais son évolution profonde, comme l’évolution écologique, ne se produisent que lorsqu’une scissure fracasse le monde vivant : guerre, extinctions massives, épidémies. Chaque catastrophe est une occasion d’évolution. Ce sont les bouleversements démographiques qui déclenchent de nouvelles manières de voir, penser et vivre le monde.
 
Preuve en est la fameuse «peste noire» de 1346 qui extermina un européen sur deux , fit disparaitre 80% de la population de Florence, 75% des habitants de Venise, et 3 millions de français en deux ans (*) Cette épidémie, comme toutes celles qui suivirent, eurent la caractéristique de provoquer non seulement des bouleversements dans les échanges de l’homme avec la nature mais aussi dans les relations de pouvoir, les rapports concernant la valeur et la propriété des biens matériels, la tenance des terres, la revalorisation de certaines main-d’œuvre au point que le servage disparait et avec lui le principe même de la féodalité. De même, les rapports familiaux évoluèrent puisqu’à l’inverse de l’épidémie actuelle, ce furent les jeunes enfants et les femmes qui mouraient, laissant la société aux plus âgés qui donnèrent une lumière nouvelle à l’affection au sein des familles, à de nouvelles expressions dans l’art, la culture et un nouvel agencement des rôles.
 
Après chaque invasion, chaque guerre, nos projets d’existence subissent une réorganisation fondamentale. Les deux dernières guerres mondiales ont provoqué la disparition de 72 millions de militaires et de civils, soit 3.75% de la population totale de la planète en 1945, mais pulvérisé l’ancienne culture qui reléguait les femmes au foyer et les hommes dans les mines et les usines. Nos processus de socialisation ont pu s’articuler à partir de nouvelles représentations qui ne reposaient pas sur une action réformiste impulsée par des Etats ni par une révolution politique, mais plutôt sur l’évidence que c’est à partir du décentrement de soi que naissent la conscience et la créativité nécessaires pour devenir capable de percevoir le monde et lui donner forme, dans son ensemble, son équilibre, ses hiérarchies véritables.
 
La catastrophe que la planète subit actuellement frappe l’humanité dans sa totalité et même si chaque pays, chaque état, chaque peuple et chaque homme pense, souffre et agit de façon différente en raison de ses propres circonstances, une chose est claire pour tous, nous ne revivrons plus jamais comme avant. Nous allons devoir faire le travail affectif et rationnel qui consiste à cesser de penser au trama pour mobiliser la faculté que nous avons de métamorphoser les représentations que nous avons de la société passée. C’est à partir de l’effondrement de l’ordre culturel et sociétaire que nous connaissions que nous pouvons trouver la créativité qui fera émerger une plus juste échelle des valeurs : l’élaboration d’un nouveau contrat social s’impose comme une urgence pour reprendre une nouvelle évolution.
 
(*) François de Lannoy – Pestes et épidémies du Moyen-age 2016

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