Les Samadhi du Samedi – «LE CHANT DE LA VIE»
Mettre de l ´ordre dans ses placards est une discipline salutaire de fin d´années, mais c´est aussi un sport de hauts risques.
Je m´explique : A la veille d´une campagne électorale qui devrait définir , rénover les plans de gouvernance proposés par de nouveaux élus (élues) au Parlement, le hasard place entre les papiers que je destinais à la décharge un article publié en 1985 dans «El Comercio» (*) qui, comme un gifle, surgit de l´ombre pour me rappeler comme le chantait Carlos Gardel que « 35 ans, ce n´est rien »(**) .
La marche populaire d´hier, partagée dans le monde entier, pour revendiquer le droit des femmes à être protégées du féminicide, la violence familiale, l´abus sexuel et le viol est la preuve que rien ne s´est passé ou presque depuis 4 décennies.
Au Pérou, où 3 femmes sont violées chaque heure qui passe (***) les candidats (es) à décider des termes de la Loi évitent royalement d´aborder le sujet. Les entrevues journalistiques posent la question en termes d´appartenance religieuse, doctrinale ou professionnelle.
Les vraies issues d´une politique de « genre » sont évitées ou traitées du bout des lèvres. Aucun candidat n´a placé ce thème qui touche au cœur de la société à la place qui lui revient : le Pérou est le 3ème pays (juste derrière l´Ethiopie et le Bangala Desh) où se produisent le plus de viols et de féminicides.
5 ans après la Loi Veil (***)qui révolutionnait l´Europe, au Pérou, le printemps politique du retour à la démocratie de 1980 n´avait pas suivi le renouveau mondial en la matière, mais les Législateurs responsables de modifier le Code civil et les politiques avaient au moins pris acte des résultats de l´enquête sociale de Profil de la Femme Péruvienne (*****) et il n´est pas vain de croire que la connaissance et la diffusion du véritable ressentir des femmes de Lima, entre 25 et 29 ans , eut un écho positif dans la conscience des décideurs en matière juridique en Colombie et au Pérou.
La lutte anticorruption a fourni jusqu´à présent au Pérou une sorte de bouclier face aux explosions de violence qui éclatent dans la région. Mais quel Etat moderne, laïque, démocratique peut-il affronter pendant 40 ans la clameur de la moitié de sa population, celle à qui il est de bon ton d´offrir des chocolats ou de partager un épi de maïs ou un poulet rôti une fois l´an si, pendant 365 jours, depuis 40 ans, aucune voix politique ne met au cœur de son action la revendication du seul principe qui légitime une société : le droit à la vie, l´égalité l´intégrité, la santé et l´éducation pour tous, mais aussi et surtout pour toutes : celles qui, avant que nous ne naissions, nous bercent du chant de la vie.
Marie-France Cathelat.- 24 Novembre 2019
(*) « Silencio político sobre el tema de la mujer” M.F.Cathelat El Comercio Page E 2 Sección E 24 Marz 1985
(**) Tango “Volver” que Carlos Gardel rendit célèbre lors d´un retour à Buenos Aires
(***) Simone Veil, ( 1927-2017) Survivante d´Auschwitz, Ministre de la Santé qui obtient l´approbation de la Chambre des Députés et le Sénat en Janvier 1975 pour la dépénalisation de l´interruption de grossesse (IGV) avant la dixième semaine, sous conditions.
Membre du Conseil Constitutionnel de France–Présidente du Parlement Européen
Membre de l´Académie Française-4 -ème Femme enterrée au Panthéon des Invalides
(****) Perfil de la Mujer Peruana- T.Burga-MF Cathelat- 1980 Edit. Ausonia-Lima