Les Samadhi du Samedi | Ep.23

Les Samadhi du Samedi | Ep.23

Les Samadhi du Samedhi – « Proverbes de la vie en rose »

Un proverbe roumain dit « on peut juger l’homme par sa nation mais pas une nation à travers un homme » cet exemple de sagesse populaire vient à l’esprit à propos de l’incident médiatique des « tabliers roses ».
 
Nul Doute que les intentions les plus louables assistent l’initiative de nombreux décideurs et de la plupart des groupes d’opinions dans leur pieux souhait qu’en changeant la couleur de l’habit, on change le comportement de celui qui accepte de le porter. La récente révélation de terribles dérives ecclésiastiques devraient cependant permettre d’établir de plus justes frontières entre le fond et la forme de nos sociétés.
 
Toute hypothèse est une rêverie, toute méthode une manipulation qui permet de modifier le réel, un cheminement qui découvre une chose occulte, s’il produit un changement de regard, la découverte du refoulé. L’histoire du renouveau scientifique démontre que les novateurs sont généralement les êtres capables d’apporter un regard nouveau à une réalité soi-disant immuable même et surtout si la pensée complexe qui intègre des données hétérogènes angoisse les esprits conservateurs fixés dans les normes obsolètes.
 
De nos jours, les travaux de l’épigénétique prouvent que les modifications de l’information héréditaire sont réversibles quand on modifie le milieu.
Par conséquent, le milieu n’évolue pas en améliorant seulement le verbe, en modifiant la récitation, car en changeant la couleur de l’habit, on empêche la prise de conscience réelle qui est la seule capable de créer de nouveaux codes relationnels, instaurer d’autres valeurs en accord avec notre temps et nos circonstances pour voter les lois inscrites dans les apprentissages de l´Education nationale qui leur donneraient une légitimité sociale.
 
On pourrait aussi rétorquer que la pensée qui se déroule sans surprise berce les consciences d’un ronron bienfaiteur, et que les déguisements du carnaval sont le levain indispensable de la joie. Mais alors que notre société clame une transformation profonde des perceptions, des rôles et des agissements des hommes à l’égard des femmes, ne faut-il pas pour modifier le regard suivre plutôt le conseil du poète César Vallejo et « changer les lunettes plutôt que l’œil ».
La démarche du « diario violeta de Carlota » de l’auteure Gemma Lienas confirme cette perception.
Face aux hommes de tout rang, couleur, expérience professionnelle, vêtus de tabliers roses, (une vêture d’aide médicale ou de nourrice eut peut être été plus appropriée face aux statistiques nationales d’abandon paternel et de carence de soins médicaux ?) la question qui venait à l’esprit de celles parmi nous qui défendons depuis plusieurs décennies l’égalité des opportunités et des droits pour la femme au Pérou et dans le monde était comme le dirait le proverbe : Je te reconnais, la morue, même quand tu te déguises. »
 
L’égalité naît du respect mutuel et du compagnonnage, ce n’est pas un tablier, c’est une conviction interne basée sur le désir de parcourir ensemble un trajet pour mener à bien un projet commun, que ce soit la vie, le travail, la profession ou le pays. Ceci naît à partir de la projection de soi que les parents et les tuteurs inculquent aux enfants, des messages des médias culturels et de communication, de ce que nous lisons parce que quelqu’un l’écrit dans les réseaux, des images que nous construisons de notre corps, notre espace, notre mission de vie.

À ce propos, le talent et la sensibilité de Susana Baca n’ont cessé de nous redire depuis 30 ans les mots d’Alejandro Romualdo :

« Si vous peigniez mon pays de couleur rose
Vous seriez un grand peintre.
Si vos pinceaux passaient sur mon pays,
avec la couleur des rêves (…)
des rêves de couleur rose
et la terre volée de couleur rose
et ma maison et mon cœur de couleur rose
vous seriez un grand peintre pour eux.
Mais ne peignez pas d’une seule couleur rose
Les plaies de mon pays.
Laissez vos pinceaux passer sur mon pays
Avec la dureté des vents des montagnes, (…)
Couleur de feu,
Couleur de combat,
Couleur de l’espoir.
(Traduction libre de MFC)

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